Qu’est-ce qui motive un individu-adolescent à participer à une de nos aventures de création théâtrale, au-delà d’une simple envie, d’un écho, d’un désir, même imprécis, de « faire du théâtre » ?
Quels sont les motivations, profondes et/ou joyeuses, qui poussent ces jeunes gens à intégrer un travail théâtral, à investir du temps, de l’énergie et de la volonté sans en connaître vraiment le sens, la valeur et la réalité ? J’ai rarement essayé de leur poser des questions en arrivant. Chaque année aurait apporté des réponses différentes, empreintes surtout d’une belle naïveté. J’ai surtout écouté leurs commentaires les derniers jours, au moment du spectacle ou après.
Car la principale difficulté d’un rapprochement possible entre eux et moi, résiderait, au départ, dans la façon dont je pourrais analyser avec eux, de façon simple et claire, un « Pourquoi faire du théâtre ? », surtout quand on sait que beaucoup pensent le théâtre uniquement par les clichés qu’il véhicule. A défaut de le connaître, il raconte autre chose dans l’esprit de nombre d’adolescents. Il est la représentation spectaculaire d’une forme exacerbée de mots et d’attitudes plus ou moins narcissiques, dont on voit les facettes humoristiques, traitées comme des sketchs, et la dimension publique, principalement à la télévision.
Mais, pour d’autres, c’est une représentation en temps scolaire qui a suscité leur curiosité. Pour d’autres encore, c’est une réelle et simple envie, ou encore la sensation de se projeter dans un personnage, un héros.
Et puis, enfin, il y a le bouche-à-oreille de la fratrie, des ami(e)s qui ont déjà participé à une telle aventure.
Je sais, pourtant, que la plupart des adolescents qui nous rejoignent ont une part de leur esprit encombré par des questionnements, par des envies et des répulsions embrouillées, non gérées. C’est cette gestion emmêlée de leur âge qui les fait « sortir du bois », et venir nous rencontrer. Certes, nous en avons qui ont essayé et pratiqué ce qu’ils appellent « du théâtre », mais ils ne forment pas la majorité et leur connaissance de la question est assez primaire, comme je l’ai dit précédemment. Ils parlent du plaisir qu’ils ont de jouer, de se « mettre dans la peau d’un autre », de tout un tas de sensations légèrement narcissiques dues naturellement à leur âge et à un apprentissage relativement traditionnel du théâtre en classe ou en atelier.
Et il y a les autres, ceux dont on ne veut pas trop savoir pourquoi ils viennent. C’est ce mystère qui les rend attrayants. Il y a chez eux tout un entassement de sensations maladroites mais généreuses, tout une approche incomplète d’arguments qui nous laissent penser qu’ils ne savent rien du théâtre que nous allons faire, mais sont disposés à faire avec. Tout au moins ce qu’ils pensent en savoir.
Extrait de l’ouvrage Un théâtre et des adolescents – tome 2 (Les années Pélican), de Jean-Claude Gal.
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