Manifeste saxifrage à balancer dans la nuit.
Nous sommes naissance. Ombre et chair. Lumière et mort. Des zèbres des nuits profondes - du grand voyage vers nous-mêmes. Vaisseaux fantômes. Opprimés d’ailleurs. Des funambules en quête de sens. Nous nous cherchons au milieu de nous. Nous nous cherchons au milieu du monde. Nous cherchons en deçà et au-delà des impasses. Nous marchons à l’envers. Coiffés d’une langue au milieu des orages. La langue brûlée comme la forêt nous marchons. Des soldats rouges. Des chercheurs d’or. Des pieds frappant impétueusement le sol tap-tap-tap- tap-tap-tap-tap-tap-tap nous ne cherchons pas la couronne d’épines tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap nous inventons une autre histoire au milieu des paysages pourpres et des vallées pleines de fumées tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap nous dansons autour des brasiers qui sentent l’explosion. Nous offrons nos têtes au vent. Nous marchons pareil aux pluies qui ne cessent pas tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap nos pas sont la boue de notre alphabet. Nos mots marchent dans nos bouches. Nous marchons en quête de nous-mêmes. Irruptés du réel. Différents hagards paumés mais aussi puissants fous assoiffés en quête de réponses ou d’une plus grande question. Il y aura des arrêts des immédiats mais l’arrêt n’est pas absolu. Parfois nous sonnerons à vos portes juste pour vous saluer juste comme ça voilà :
Ding-Dong Bonjour madame je trouve le défilé des nuages idiots pas vous ? Je ne sais pas quoi faire de l’ai pas vous ? Je vais me foutre en l’air pas vous ?
Nous questionnons notre moelle mortelle.
Je suis frites / Nuggets/ ordinateur/ gâteaux / jeu vidéo / jeu vidéo / jeu vidéo/ famille/ chien / chat / bonheur / être -avoir / aimer / boire / bouffer / bouboule / bouboule / golf / lit lit lit lit lit lit / Netflix / Netflix / Netflix / Netflix / fuck fuck fuck et encore fuck/ téléphone / téléphone / téléphone / like / Instagram / like like like / adorer adorer adorer / manger manger manger / paradis / tomate / je ne sais pas /je ne sais pas /je suis paumé paumé paumé et merde je pleure …Est-ce que les larmes ne sont que dans ce qui nous fait pleurer individuellement ?
Ding-Dong Bonjour madame je ne suis qu’un sale égoïste qui ne s’intéresse qu’à son triste sort enfermé dans la misérable coque de l’individualité humaine quand pourrais-je entendre l’écho de cette sublime clameur de joie et de douleur qui monte dans l’immensité de la nuit des mondes ?
Nous cherchons au fond de nos chaos ce que nous sommes ou ce que nous ne sommes pas et « si nous avons la chance de nous trouver nous découvrons que nous sommes toujours un inconnu pour nous-mêmes »(1)
Si mon cul c'est du poulet, vais-je pondre des œufs ? Est-il possible de retrouver le pain perdu ? Les pingouins ont-ils des genoux ? Pourquoi n’y-a-t-il pas d’issues de secours dans les cimetières ? Pourquoi les serpents qui sifflent la merde qui pue et la beauté de l'absolu ? Suis- je en danger quand je dors ? Qui-suis-je dans la solitude ? Est-ce que la France va gagner le prochain mondiale de foot ? pourquoi a-t-on autant de cours dans la journée ? Peut-on vivre sur Mars ? Ce sera quoi la suite pour la Planète ? Pourquoi existe-t-on ? Qui se rappelle ses premiers jours au monde ? Pourquoi les vies parfaites ne sont que dans les films ? Pourquoi les riches sont-ils violents ? Pourquoi les gens sont assez cons pour voter pour des mecs comme Bolsonaro ou Trump ? Et quand tu joues à Candy Crush dans ta chambre et que ton frère vient te péter les couilles pourquoi ?
Nous nous cherchons telle une poussée vivante qui fracture la consistance écrasante du monde. Debout. Imprévisibles nous sommes saxifrages dans la nuit.
Je cours dans la foret traverse la tempête saute la barrière glisse sur la glace plonge dans la nuit fou ivre du vent les branches m’écorchent la peau me griffent le visage je saigne tombe crie renait rugit sous la pluie gagne le mistral j’avale la fleur du souffle j’avale plein de crayons je cours vers le cristal je dessine un globe j’ai chaud j’ai froid je veux le monde j’ouvre les bras et courir courir courir encore
Nous fonçons dans le trou du mythe. Nous questionnons la loi du flingue les milliers de tonnes de morts. Nous traversons. Nous cherchons les vivants qui cuisent dans les fours du gouvernement. Nous cherchons les rebelles qui croupissent dans le bunkers d’isolement. Avec nos pieds nous imitons le martèlement mécanique du tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap de la mitrailleuse tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap anéantir la structure du pouvoir des trusts multinationaux tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap anéantir l’impérialisme dominant tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap nous piétinons le foulard noir de nos comas tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap le pacte avec le diable tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap les corrompus à l’obscène tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap les meurtriers applaudis sur la scène. Le sang craché sur nos visages. Les arbres malheureux qui empêchent de dormir la nuit. Nos visages nos blessures nos seins blêmes -ce collier tatoué sur nos gorges- ce code-barre qui nous tue qui nous tue qui nous tue … tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap Nous nous cherchons tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap Nous cherchons la pépite d’or sous les charniers économiques. Nous cherchons l’étoile au fond du puits tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap. Nous cherchons le sens du monde dans la caverne des idoles où règne un froid tragique. Nous nous demandons qui vient fixer l’extrême limite au-delà de laquelle plus rien n’est possible. Nous cherchons dans l’ombre de chacun. Nous cherchons l’ondée qui délivre des fleurs noires. Nous questionnons sur les rings du monde notre liberté d’acteur politique. Nous questionnons le théâtre comme la possibilité d’un exercice de radicalité. Nous suspendons nos peaux à l’absolu refus. Au refus du silence tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap-tap A la nécessité de sortir de nos cellules mortes tap-tap-tap-tap-tap- tap-tap-tap-tap Nous sommes parole légitime et libre. Nous sommes parole réveillée des larmes. Nous sommes jeunesse qui interroge la violence de ce monde qui refuse toute question.(…)
Création dans le cadre du Festival La Cour aux Ados #3
Création : Conservatoire à Rayonnement Régional – Clermont-Ferrand
Mise en espace : Pascale Siméon
Lumières : Catherine Reverseau
Travail vocal : Nathalie Chambéry
Travail chorégraphique : Kevin Martial
Avec : Nicolas Amatulli, Tess Cazenave, Sarah Donsimoni, Ewan Fardao, Hippolyte Sève, Elisé Siguret et Solal Viala